Historique
      
    Avec l'apparition de l'agriculture et de l'élevage à l'époque néolithique, les peuples chasseurs-cueilleurs devenus agriculteurs durent rapidement faire face à un problème majeur : contenir le bétail dans des enclos suffisamment hermétiques pour éviter sa divagation mais aussi protéger les cultures des dégâts occasionnés par les animaux sauvages ou domestiques.

     La première solution a certainement été de construire des murets de pierres sèches là où la matière première abondait, cette pratique est toujours en usage en Irlande et dans les régions de montagne. Les murets se couvraient rapidement d'un boisement naturel d'épineux qui renforçait leur vocation défensive.

 
Pyrénées

    
     

        Là où le bois était disponible en quantité, la confection de palissades de branchages tressés était d'usage. Ces palissades portent le nom de "haies sèches" ou" haies mortes". Ce type de clôture, s'il avait l'avantage de l'efficacité, était peu durable et devait être remplacé régulièrement. L'importante consommation de bois nécessaire à la construction et à la maintenance de ces ouvrages se faisait au détriment des réserves. Certains gouvernements royaux, soucieux de préserver la ressource, recommandaient à leurs sujets la plantation d'arbres et d'arbustes vivants pour la réalisation des clôtures. Les haies de bois vif ne demandaient pas plus de travail et étaient plus pérennes que les haies de bois mort. Ainsi sont apparues les premières "haies vive".

 
"Haie sèche" ou "Haie morte"
       La haie vive a un inconvénient majeur : son homogénéité n'est pas toujours parfaite. C'est surtout au pied des haies que les dégradations sont les plus marquées. Les végétaux se dégarnissent à la base, certains arbustes meurent ou sont broutés par le bétail et les animaux profitent bien souvent de ces faiblesses pour retrouver leur liberté! Nous sommes à la fin du moyen âge, le fil de fer n'apparaîtra qu'à la fin du 19eme siècle ; le paysan imagine donc une technique de conduite et d'entretien de la haie qui survivra jusqu'à nos jours: le" plessage" (plissage) ou" tressage" des haies vives. (voir glossaire)


 
      La technique du plessage a semble t- il été pratiquée partout ou la haie était utilisée pour le pacage des animaux domestiques, le côté naturellement défensif des épineux étant renforcé par le tressage des végétaux. Les techniques étaient cependant différentes d'une région à l'autre et elles variaient également en fonction des essences travaillées : chêne et noisetier dans le Morvan, hêtre en Normandie, aubépines et prunellier en Flandres et en Avesnois... La tradition la plus marquées est celle qui perdure au Royaume Uni. Dans certaines régions bocagères comme le Pays de Galles il est toujours possible de trouver des éleveurs perpétuant cette coutume. Ces techniques, souvent différentes d'une région à l'autre et apparemment très codifiées sont pratiquées avec un outillage manuel spécialement adapté. Elles font maintenant l'objet de nombreux stages et compétitions répartis sur tout le royaume.

 
Boulonnais

     Si le plessage avait pour objectif premier de regénérer et de densifier une vieille haie, il était aussi un moyen de récolter du bois de chauffage. En France, cette coutume a perduré dans certaines régions jusqu'aux années 1960. L'évolution des pratiques agricoles qui est apparue à cette époque et qui a profondément modifié les paysages de toute l'Europe en détruisant en quelques années des bocages nés il y a plusieurs siècles a mis un coup d'arrêt à une pratique très répandue depuis le 18ème siècle. D'anciens agriculteurs pratiquent encore le plessage dans le Morvan, le Perche et la Flandre. Dans les autres régions, la coutume semble s'être éteinte après la deuxième guerre mondiale.

Haie plessée
Morvan
     C'est sous la forme de "reliques" de plessage que l'on peut maintenant découvrir ces techniques oubliées. L'hiver étant la saison la plus propice à la recherche de ces vieilles haies ouvragées. On retrouvera facilement ces marques sur les grosses branches horizontales de hêtre, de charme, de noisetier... qui ont conservé une forme que le paysan leur avait imposé il y souvent quelques décennies.
Les haies plessées de hêtre sont sans doute les plus harmonieuses. Leurs troncs gris incrustés de lichens prennent l'allure de candélabres aux formes variées. Ces végétaux, "torturés" par l'homme, ont mémorisé des pratiques aujourd'hui disparues.
     
Ces haies, considérées maintenant comme "patrimoine" en raison de la valeur ethnologique qu'elles représentent mériteraient d'être préservées. Un classement des plus représentatives serait souhaitable avant leur totale disparition !





Plesse de hêtre > 70 ans
Boulonnais
 
Aubépines plessées
Flandre Française